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Pénitencier national : chronique d’une catastrophe sanitaire annoncée

Haïti standard, le 17 août 2020.-

La visite du ministre de la justice et de la sécurité publique, le 7 août 2020, n’a pas atténué la crise sanitaire qui prévaut au pénitencier national. Avec plus de 3 mille détenus, ce dernier est réputé d’être le plus grand centre carcéral du pays. Des cas de tuberculose et d’autres maladies telles l’hernie sont fréquents à ladite prison, ont confié plusieurs sources proches de celle-ci à la rédaction de Haïti standard.

« À force de côtoyer des détenus atteints de tuberculose, sans aucune mesure de protection, au moins un policier affecté au pénitencier national a contracté cette maladie », a rapporté l’une de nos sources à la prison qui a révélé que le véhicule préposé au transport des détenus à l’hôpital est en panne depuis environ un mois.

« Les détenus malades au niveau des prisons civiles de Port-au-Prince, Croix-des-Bouquets et Cabaret (où sont placées des femmes) n’ont pas été emmenés à l’hôpital depuis le dysfonctionnement de ce véhicule qui remonte à environ un mois », s’est indignée notre source.

Depuis près de deux (2) ans, 43 patients qui souffrent notamment d’hernie, au pénitencier national, ont nécessité d’une intervention chirurgicale qui jusqu’à présent n’a pas été réalisée. Certains d’entre ces patients sont décédés faute d’avoir subi cette intervention, a déploré notre source qui a ajouté que le Ministère de la santé publique et de la population (MSPP) ainsi que le Ministère de la justice et de la sécurité publique (MJSP) se renvoient la responsabilité, pour une question de budget.

À côté de tout cela, une vague de gratelle sévit à la prison civile de Port-au-Prince. Les mauvaises conditions sanitaires y sont pour beaucoup, car l’espace où sont placés les déchets est parfois infesté de vers de terre et d’autres bestioles. D’autant plus, ces déchets ne sont pas enlevés à temps ou selon un calendrier régulier…

Par ailleurs, nos sources au pénitencier national sont unanimes à reconnaître que le personnel médical travaillant à la prison dispose de la volonté de soigner les patients, mais ce personnel est dépourvu de moyens.

De la maltraitance au pénitencier national

À côté des mauvaises conditions sanitaires susmentionnées, de la maltraitance vis-à-vis de certains détenus a été signalée par nos sources. Celles-ci décrivent deux (2) groupes de policiers travaillant à la prison civile de Port-au-Prince.

L’un des groupes est présenté comme « bon » et l’autre comme « mauvais ». À la tête du « mauvais groupe » un policier s’autoproclamant « Barcelone » et c’est lui qui détiendrait la réputation d’infliger des traitements humiliants et dégradants à certains détenus. Les victimes, dans la plupart des cas, se font uriner ou déféquer dans leur pantalon, a rapporté l’une de nos sources.

Pénitencier national : chronique d'une catastrophe sanitaire annoncée
Vue partielle de quelques cellules à la prison civile de Port-au-Prince (photo Pierre Arnold Junior/Haïti standard)

La situation exécrable qui prévaut dans les prisons haïtiennes, particulièrement au pénitencier national, est palpable. Les responsables de la prison en sont conscients. Les récentes déclarations du directeur de l’administration pénitentiaire, Charles Nazaire Noël, qui réalisait un état des lieux au moment de la visite du ministre de la justice, Me Rockfeller Vincent, à la prison civile, est une preuve tangible. Le responsable de la prison avait déclaré que la capacité initiale du pénitencier national était de 800 détenus, à l’heure actuelle la prison en compte plus de 3 mille.

HS/Haïti standard